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Stérilet au cuivre : des troubles de l’humeur souvent méconnus

stérilet au cuivre

Il est le moyen de contraception le plus recommandé aux femmes qui ne veulent plus d’hormones dans leur corps. Mais au-delà des règles plus abondantes et douloureuses, le stérilet au cuivre provoquerait d’autres effets secondaires souvent ignorés, comme des troubles de l’humeur. Marion Ruaud 

 

« Plus jamais j’en remets un ! Tout, sauf ça ! ». Laëtitia, 36 ans, est formelle. La jeune femme a connu des syndromes prémenstruels « insupportables » causés, selon elle, par les stérilets au cuivre posés avant et après ses deux enfants. « En plus de règles très abondantes, limite hémorragiques, et plus douloureuses, j’ai constaté des sautes d’humeur et une certaine irritabilité. Mon compagnon ne me reconnaissait pas. « Tu te transformes », me disait-il» 

Laëtitia ne fait pas le lien tout de suite. C’est en écoutant un épisode du podcast La Matrescence, réalisé par la journaliste Clémentine Sarlat, qu’elle prend conscience de ce qui lui arrive. D’après une étude américaine, le stérilet a pu causer des dépressions chez un petit pourcentage de femmes : « Le DIU (dispositif intra-utérin) provoque une inflammation continue de la muqueuse contre laquelle le cerveau se bat en permanence ». Clémentine Sarlat poursuit : « Depuis qu’on m’a posé le stérilet, je ne me sens pas bien, mon humeur a changé » et précise bien qu’il s’agit d’un DIU non-hormonal. 

 

Solution miracle 

La journaliste met en avant le manque d’informations de certains professionnels sur tous les potentiels effets secondaires de chaque contraception, qu’elle soit hormonale ou non : « On se dit pas d’hormone, donc pas d’incidence ». « Ma gynéco me l’a vendu comme une solution miracle. Elle m’a parlé d’éventuelles règles plus abondantes mais jamais ne m’a alertée sur de possibles troubles de l’humeur », se souvient Laëtitia. Pour Marie Leschi, sage-femme à Bordeaux : « Il n’y a pas un moyen de contraception parfait, sans effet indésirable. Pour ma part, je les liste tous car les patientes sont en droit de savoir ce qui peut exister ». 

Selon l’ANSM, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, celui au cuivre représente plus de la moitié des ventes de DIU. Placé dans l’utérus par un gynécologue ou une sage-femme, il a une durée d’efficacité de quatre à dix ans (cinq pour le stérilet hormonal). 

 

Angoisses et irritabilité 

Sautes d’humeur, irritabilité, hyperémotivité, sentiment de déprime, sont autant d’effets secondaires qui rendent le syndrome prémenstruel encore plus difficile à gérer. Non systématiques, ils étaient jusque-là souvent associés aux contraceptions hormonales, comme l’indique un communiqué de l’ANSM, qui parle d’un « risque faible de dépression ou de troubles de l’humeur (humeur dépressive) ». En revanche, rien n’est mentionné concernant le DIU au cuivre. Du côté de la Haute Autorité de Santé non plus. 

Pourtant, Laëtitia n’est pas la seule. Des groupes Facebook ont vu le jour comme « Victimes stérilet cuivre » qui compte environ 5 000 membres. Des centaines de femmes, anonymes ou non, racontent leurs mauvaises expériences : « J’ai retiré mon stérilet au cuivre suite à des symptômes d’anxiété généralisée sans cause réelle ». Les mots « irritabilité », « fatigue excessive », « colère », reviennent souvent en parcourant les posts. Certaines témoignent même de « brouillard mental », de « crises d’angoisses inexpliquées », « d’idées noires ». Elles ne se reconnaissent pas et espèrent redevenir « normales ». 

Marie Leschi s’en étonne. En cinq ans, les seuls retours négatifs qu’elle a pu entendre quant au DIU au cuivre, concernent les saignements et les douleurs de règles. « On se doit de considérer les témoignages de ces femmes mais tout en tenant compte de l’âge, de la période de vie, des grossesses ou non, du profil hormonal… Et tout ça, ça évolue », livre-t-elle. 

 

Charge mentale contraceptive

Peu d’options s’offrent aux femmes qui ne veulent plus d’hormones. Pauline, 39 ans, a opté pour le stérilet au cuivre depuis cinq ans, après sa deuxième grossesse. Elle constate aussi un changement d’humeur concomitant du SPM : « Je sens tout de suite quand il arrive, ça se traduit notamment par un fond d’irritabilité un peu latent mais je préfère ça que reprendre la pilule ».

D’après une étude réalisée par des chercheurs mexicains en 2005, un excès de cuivre dans le sang pourrait altérer l’humeur. En effet, son action pro-inflammatoire peut affecter les hormones, surtout si un déséquilibre hormonal est déjà présent et peut intensifier le SPM. 

Sur le groupe Facebook, l’avant/après est flagrant pour les femmes qui l’ont retiré. Certaines parlent de « délivrance ». Aujourd’hui, par manque d’alternatives, Laëtitia a opté pour le préservatif comme moyen de contraception. 

« Entre la période d’ovulation, le SPM et les règles, plus de la moitié du mois, on est gênées et en souffrance », reconnaît Pauline. La charge mentale contraceptive repose essentiellement sur les femmes et les effets secondaires subis renforcent les inégalités entre les sexes. Ne pas ingérer de contraceptif, ne rien mettre dans son corps, ne plus avoir de SPM violent, s’apparente à une libération. Pour soulager cette charge, d’autres solutions existent. Comme la vasectomie. 

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